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Réchauffement climatique ou pas ? D’origine anthropique ou pas ?

dimanche 1er décembre 2013, par Aurélien Deragne (ECL 98) , Cédric Ringenbach (ECN 96)

Le GIEC vient de publier son 5ème rapport et celui-ci confirme la réalité du réchauffement climatique, et évalue la probabilité de son origine anthropique à 95% (contre 90 % dans le 4ème rapport).

Comme à l’occasion de tous les précédents rapports, des doutes "climato-sceptiques" se font actuellement entendre dans la presse.

L’un des arguments les plus fréquemment repris est que, contrairement au discours du GIEC :

« c’est une hausse des températures qui engendre une hausse de la concentration en CO2 (le principal des gaz à effet de serre) dans l’atmosphère et non l’inverse. ».

Eh bien, cette affirmation est pour moitié VRAIE et... pour moitié FAUSSE !

Pour moitié VRAIE :

Les mesures réalisées à partir des carottes glaciaires confirment en effet que depuis 800 000 ans une hausse des températures a historiquement engendré une hausse de la concentration en CO2 lors des périodes de déglaciation. De même, lors des périodes de glaciation, c’est la diminution des températures qui a précédé la décroissance du taux de CO2. Le mécanisme est le suivant :

Les cycles de Milankovitch décrivent comment les influences combinées des autres planètes du système solaire modifient le mouvement de la Terre autour du soleil de plusieurs façons : précession des équinoxes, inclinaison variable de l’axe de rotation terrestre par rapport au plan de l’écliptique, excentricité de l’orbite terrestre autour du soleil. Ces variations seraient neutres sur une planète complètement symétrique : ce qui se passe au nord serait compensé par ce qui se passe au sud ou par ce qui se passe 6 mois plus tard.

Mais la Terre n’est pas symétrique : vers le parallèle 60, il y a majoritairement de la terre au nord et de l’océan au sud. Et c’est précisément dans ces latitudes qu’il y a de la neige en hiver et pas en été.

Périodiquement, environ tous les 100 000 ans, l’hémisphère nord est moins exposé au soleil au printemps, au moment où la neige devrait fondre. Durant ces phases, la surface de neige va donc augmenter, augmentant l’albédo (les couleurs claires réfléchissant les rayons solaires), ce qui va réduire la quantité de chaleur solaire reçue et ainsi renforcer le refroidissement.

Le phénomène symétrique, dans l’hémisphère sud, n’a pas de conséquence car il n’y a pas de neige à ces latitudes, et pour cause : on est en plein océan.

A l’inverse, durant les phases des cycles de Milankovitch où l’hémisphère nord reçoit plus de chaleur au printemps, celle-ci fait fondre la neige ce qui réduit l’albédo et amplifie le réchauffement.

C’est ce phénomène qui est le moteur des glaciations et des déglaciations au cours du dernier million d’années.

On observe que les variations de température ont un impact sur la concentration en CO2. Ce mécanisme est bien connu : un océan froid contient plus de CO2 qu’un océan chaud (tout comme une bouteille de champagne dont la pression est de 2 bars de plus si elle est chambrée), et la végétation joue également un rôle. Le temps de réponse est d’environ 800 ans. Ainsi, d’une glaciation à la déglaciation suivante, la teneur en CO2 de l’atmosphère a varié de 180 ppm (parties par million, ou cm3/m3) à 300 ppm, et ceci jusqu’à l’ère préindustrielle (nous étions à 280 ppm au début XIXe siècle).

Il est donc vrai que la température a un impact sur le CO2 et que c’est elle qui a varié en premier lors des glaciations et des déglaciations du dernier million d’années (graphique n°1).



Graphique n°1

Les points représentent en abscisses la concentration en CO2 en ppm et en ordonnées la variation de température en Antarctique en degrés Celsius par rapport à aujourd’hui sur les derniers 650 000 ans. On note la corrélation entre la concentration en CO2 et la température.

En bleu : les périodes de refroidissement, et en rouge les périodes de réchauffement. On observe que les points bleus sont en dessous de la droite de régression linéaire alors que les points rouges sont au-dessus. Ceci illustre le déphasage (la température est en avance de phase).

Nota : en Antarctique, les variations de température ont une amplitude à peu près deux fois plus grande qu’en moyenne sur Terre.


Mais le fait que ce phénomène existe ne veut pas dire que le phénomène inverse n’existe pas !

Pour moitié FAUSSE :

Car le phénomène inverse existe bien. L’effet de serre est connu et a été décrit depuis plus d’un siècle. L’effet de serre engendre immédiatement un forçage radiatif, la hausse des températures n’étant complètement atteinte qu’après une période comprise entre 50 et 100 ans, compte tenu de l’inertie des océans (le forçage radiatif correspond au déséquilibre entre l’énergie reçue du soleil et l’énergie infrarouge réémise vers l’espace, une partie de cette dernière étant renvoyée par les gaz à effet de serre, les GES, vers la terre).

Ce forçage radiatif a été calculé précisément dans le rapport du GIEC. Il serait aujourd’hui supérieur à 2,2 W/m², après avoir été estimé à environ 1,7 W/m² en 2007 (dans le 4ème rapport du GIEC), environ 1,2 W/m² en 1980 et environ 0,5 W/m² en 1950 (graphique n°2).



Graphique n°2


Concrètement, la concentration en CO2 de l’atmosphère a fortement augmenté depuis le début du XXème siècle et notamment depuis 1950 (elle est actuellement de plus de 390 ppm, valeur inégalée depuis plus de 800 000 ans), et continue à croître régulièrement. L’origine est clairement anthropique : on peut calculer que la concentration actuelle correspond aux émissions humaines liées à la production d’énergie depuis 150 ans et à la déforestation, desquelles il convient de déduire l’effet des "puits naturels" (océans, végétation).

Sur le graphique n°1 ci-dessus, on constate claire-ment que le niveau de CO2 observé aujourd’hui (Point à près de 400 ppm) est inédit et surtout amorce une hausse des températures dont la caractéristique est d’être très rapide, comme on le constate sur le graphique 3 ci-après, et ceci sans commune mesure avec l’échelle de temps des glaciations et déglaciations, se chiffrant en dizaine de milliers d’années. L’ordre des causes et des effets est différent aujourd’hui de celui constaté entre les périodes glaciaires et interglaciaires. C’est bien la preuve que ce ne sont pas les cycles de Milankovitch qui sont à l’œuvre et que nous sommes face à un autre phénomène.

D’autres objections font remarquer que la température n’a pas augmenté immédiatement depuis que l’homme émet du CO2. En réalité le réchauffement est notable depuis 1900 (graphique n°3),



graphique n°3


mais une pause est constatée entre 1950 et 1970. Concernant cette pause, l’hypothèse actuelle est que la période des trente glorieuses a été marquée par de fortes émissions de particules occultantes, qui ont réduit le pouvoir de réchauffement solaire (au prix d’une certaine pollution évidemment). De plus il faut savoir que compte tenu des nombreuses causes de variation naturelle du climat, il est préférable de raisonner sur des périodes de 30 ans. Ce dernier point explique aussi pourquoi il faut prendre du recul par rapport à la nouvelle relative pause observée depuis la fin des an-nées 90.

En conclusion , le réchauffement actuel est avéré, et son origine anthropique est quasi-certaine (estimation de 95% de probabilité dans le dernier rapport du GIEC). Ceci dit, compte tenu de l’inertie du système planétaire, le réchauffement provoqué par le CO2 anthropique n’a probablement pas encore atteint son maximum et des questions restent ouvertes : quelle hausse au final, et dans combien de temps, les émissions de CO2 continuant à augmenter ?

Retrouvez également cet article dans le Flash n°37.

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