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Le Nucléaire en Chine

samedi 1er juin 2013, par Jean-Claude Bordier (ECLy 69), Sébastien Charreire (ECLi 01)

Devant les problématiques liées au dérèglement climatique, à la sécurité des approvisionnements énergétiques dans un contexte de raréfaction des ressources fossiles, le nucléaire apparaît aujourd’hui comme une composante majeure du « mix » énergétique des pays industrialisés et des pays en voie de développement.

La Chine, actuel moteur de l’économie mondiale, est devenue depuis 2006 le pays le plus émetteur de gaz à effet de serre, devant les États-Unis. Il apparaît donc opportun de dresser le bilan et les perspectives de la consommation d’électricité en Chine ainsi que du positionnement du nucléaire au sein du mix énergétique chinois.

Une explosion de la consommation d’électricité en Chine ces trente dernières années

En lien avec son développement économique, la consommation d’électricité a véritablement explosé en Chine ces trente dernières années : elle a été multipliée par près de 20 depuis le début des années 70.

En 1986, la production d’électricité en Chine correspondait à moins de 20% de la production d’électricité des États-Unis. Aujourd’hui, ce ratio est de 80%. La Chine est en effet devenue le 2ème parc de production d’électricité après celui des États-Unis. La capacité électrique installée en Chine est fin 2009 de 874 GWe (source WNA).

Un mix énergétique chinois très carboné

Avec près de 80% d’électricité produite à partir du charbon, le mix énergétique Chinois reste très carboné par rapport à ceux des pays industrialisés.

Le nucléaire chinois représente 2,1% de la production d’électricité chinoise en 2008. Le parc nucléaire chinois est à ce jour le 7ème parc mondial (Source : International Energy Agency).

Quelques dates clés du développement de la filière nucléaire chinoise

- 1950 : Lancement de la recherche sur des applications militaires de la fission nucléaire
- 1955 : Accord de coopération nucléaire entre la Chine et l’Union Soviétique
- 1956 : Construction du premier réacteur expérimental à eau lourde à l’institut CIAE proche de Pékin et création du Ministère chargé du développement de l’énergie atomique (applications militaires)
- 1970 : Lancement par le premier ministre Zhou Enlai d’un programme électronucléaire civil
- 1974 : Émergence d’un projet de centrale nucléaire de conception et fabrication chinoise dont la construction ne commencera qu’en 1985 (Qinshan 1) à cause des errements de la révolution culturelle
- De 1985 à nos jours, construction et mise en service des centrales nucléaires civiles actuellement

Un parc nucléaire relativement jeune et performant

Le parc nucléaire chinois est constitué de 11 centrales nucléaires pour une puissance installée de près de 9 000 MWe. Ce parc est relativement jeune - la centrale la plus âgée a moins de 15 ans – et repose sur l’utilisation de 4 technologies d’origines chinoise, française (Réacteur à Eau Pressurisée, REP), canadienne (CANDU) et russe (VVER). La technologie REP est néanmoins la principale technologie utilisée au sein du parc nucléaire chinois (réacteur CPR 1000, mis au point grâce aux transferts de technologie que les Chinois ont imposé aux Français).

Les abords des rivières sont des sites privilégiés sur lesquels de futurs sites nucléaires devraient s’implanter.

En matière de performance, les disponibilités sur les centrales Daya Bay 1-2, construites par EDF et AREVA, sont remarquables et le retour d’expérience significatif. Leur taux de disponibilité est d’environ 85% en 2005, et est comparable sur les 5 dernières années à celui des centrales nucléaires européennes et américaines.

Les acteurs chinois du nucléaire

Le marché du nucléaire Chinois est structuré autour de quatre acteurs industriels principaux couvrant l’ensemble du cycle nucléaire (exploitant, architecte industriel, opérateur du cycle du combustible) : China National Nuclear Corporation (CNNC), China Power Investment Corporation (CPI), China Guangdong Nuclear Power Company (CGNPC), State Nuclear Power Technology Corporation (SNTPC).

Ces opérateurs s’appuient sur cinq entreprises chinoises capables de fabriquer et de fournir des pièces de centrales nucléaires : China First Heavy Industry (CFHI), China Erzhong (CE), Shangai Group (SEC), Dongfang Group (DEC) et HPEG. AREVA a notamment créé en 2009 une Joint Venture avec Dongfang (voir le site AREVA).

En 2013, la capacité de production de ces entreprises devrait atteindre 6 unités par an. Ces industriels sont en cours de qualification pour la fabrication de pièces forgées de réacteurs de 1000 MW et devraient être prochainement capables de fournir des pièces de l’AP1000 et de l’EPR. A noter un projet RNR de 800 MW à Sanmen, pour mise en service prévue en 2020.

Une consommation prévisionnelle d’électricité en forte croissance

La Chine devrait connaître une augmentation importante de sa demande en électricité, d’environ +160% d’ici 2020. La Chine aura à répondre à cette forte hausse, tout en tenant compte de contraintes environnementales croissantes.

Dans ce cadre, la Chine s’engage à réduire de 40 à 45% ses émissions de gaz à effet de serre par unité de PIB en 2020 par rapport à 2005 (déclaration du Conseil d’Etat Chinois le 26/11/2009). Pour autant, aucun accord engageant concret n’a été signé au niveau international (Cf. les résultats de la conférence de Copenhague de fin 2009).

Afin de répondre à l’augmentation de la consommation en électricité et au durcissement des exigences environnementales, la Chine devrait utiliser deux leviers principaux :
- 1er levier : rééquilibrer le mix énergétique, ce qui impliquera de développer :
Les importations de gaz et le réseau gazier
De l’énergie hydroélectrique encore sous-exploitée
De l’énergie électronucléaire
- 2ème levier : augmenter l’efficacité thermique des centrales électriques au charbon.

Malgré la volonté de rééquilibrage du mix énergétique chinois, celui-ci ne se trouvera probablement pas bouleversé d’ici 2020. La Chine devrait toujours dépendre essentiellement de ses centrales au charbon même si la part des autres sources d’énergies pourra augmenter sensiblement.

Perspectives du nucléaire chinois

Le programme nucléaire chinois vise à faire de la Chine un acteur majeur du nucléaire mondial. Les enjeux du programme sont de :
- Maîtriser d’ici 2020 l’ensemble de la chaîne du nucléaire
- Ne plus dépendre des technologies importées
- Développer sa propre technologie de réacteur nucléaire de 3ème génération.

Le programme nucléaire chinois doit permettre de disposer d’ici 2020 d’une puissance installée d’au moins 60 GWe. Cela suppose que 3 à 6 nouvelles unités soient mises en service chaque année pendant les 15 prochaines années, et vraisemblablement plus, certaines projections officielles faisant état de 200 GWe en 2030. Au final, le nombre de réacteurs installés croîtrait très fortement et la puissance installée pourrait être multipliée par 20. Le montant total des investissements pour atteindre ce but devrait s’élever à 67 milliards de dollars.

Actuellement, sont en construction 18 unités de Génération 2+, 4 AP1000 et 2 EPR. Près d’une trentaine d’unités sont programmées.

En conclusion , bien que l’énergie d’origine nucléaire ne représente que 5% du mix énergétique chinois à l’horizon 2020, le programme nucléaire chinois n’en reste pas moins très ambitieux, ce qui confirme la relance de la filière du nucléaire dans le monde.

Vous pouvez retrouver cet article dans le Flash n°18 de juillet 2010

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