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Les pétroles non conventionnels

mardi 1er septembre 2009, par Jacques Maratier (ECN 69)

La surinformation lancée à grand échelle durant les deux ou trois dernières années sur « la fin des réserves de pétrole dans le monde », puis l’escalade spéculative des prix de pétrole brut en 2008, ont vraisemblablement accéléré une augmentation des activités concernant l’exploitation des pétroles dits « non conventionnels ».

Dans le cadre de ce bref article, nous parlerons de deux sources de pétroles non conventionnels :
- les sables bitumineux (tar sands)
- les schistes bitumineux (oil shales)

Pour référence, indiquons aussi l’existence de pétroles lourds et extra-lourds dont les réserves sont aussi importantes.

World Wide Heavy Oil Reserves

Historiquement, l’exploitation de certains de ces gisements existe depuis la nuit des temps, par exemple en Mésopotamie, au Canada, en France et autres, et ceci bien avant l’avènement industriel du pétrole.

Ces pétroles non conventionnels représentent aujourd’hui 70% des réserves en hydrocarbures identifiées mondialement (voir l’illustration). Leur production reste aujourd’hui toutefois modeste à l’échelle mondiale, seuls le Canada et le Venezuela sont des producteurs industriels ; Le Canada produirait 400 000 bbl/jour à partir de leurs sables bitumineux. Rappelons que la production mondiale journalière se situe aux alentours de 80 millions de barils.

Les sables bitumineux

Ce sont des sables enrobés d’une pellicule de bitume (hydrocarbures très lourds) et d’eau. Le bitume sera séparé du sable principalement par chauffage.

L’exploitation de ces sables se fait dans des mines, souvent à ciel ouvert (Canada). L’exploitation se fait aussi « in-situ » dans des puits forés jusqu’à 1000 mètres de profondeur (Venezuela).

La majeure partie des gisements exploités aujourd’hui se trouve en Alberta au Canada, et dans le bassin de l’Orénoque au Venezuela. Il est estimé que le Canada et le Venezuela possèdent actuellement en réserve deux fois plus de pétrole non conventionnel que toutes les réserves de pétrole traditionnel du monde.

Il existe aussi d’autres gisements moins importants dans le monde, mais cependant exploitables, aux Etats-Unis, en Russie, au Moyen Orient et en Afrique.

Les schistes bitumineux

Ces schistes contiennent une matière organique, le kérogène, qui après un processus industriel souvent complexe, donne du pétrole et du gaz combustible. Ces schistes peuvent être aussi dans certains cas utilisés directement comme combustibles ou comme matière première pour des industries chimiques ou en agriculture.

Les schistes bitumineux connaissent un intérêt croissant dans de nombreuses régions du monde, pour le moment un cinquantaine de pays. Les réserves mondiales identifiées, en schistes bitumineux sont de l’ordre de 4000 milliards de barils de pétrole en place, dont 1000-1200 milliards de barils aux Etats-Unis.

Aujourd’hui, la majorité des extractions se font à ciel ouvert, l’exploitation manque de maturité, de conviction économique et de solutions aux problèmes écologiques inhérents ; trois principaux sites d’exploitation continuent de fonctionner au Brésil, en Estonie et en Chine.

Les coûts d’exploitation

C’est la question à la mode. Les coûts d’exploitation cités varient considérablement pour des raisons techniques, stratégiques et politiques.

De nombreuses techniques d’extraction d’hydrocarbures lourds, avant l’envoi vers une raffinerie, existent et vont de l’exploitation en surface d’une carrière, en passant par des puits horizontaux, jusqu’à des systèmes sophistiqués de récupération tertiaire de gisement ; les coûts opérationnels varient en conséquence. Des avancées technologiques substantielles ont été faites durant la dernière décennie. Les coûts d’exploitation de ces hydrocarbures sont chaque jour en baisse.

Les coûts d’exploitation sont généralement tenus confidentiels pour des raisons de concurrence. Certains états ont tendance à « rosir » les chiffres pour justifier leur soutien à cette activité. Dans l’environnement pro-écologie actuel, les relations publiques restent discrètes et les communications minima sur le sujet.

Dans ces conditions, il est extrêmement délicat d’avoir des chiffres fiables pour les coûts d’exploitation. Les journalistes et les économistes, avec parfois de maigres connaissances techniques, donnent des chiffres glanés à droite et à gauche, allant pour un même produit de 10 à 90 $US par baril.

Extraire les pétroles non conventionnels coûte en général considérablement plus que pour les pétroles « classiques », car il faut dépenser beaucoup d’énergie pour obtenir les barils utilisables ; plutôt que le coût d’exploitation les professionnels de cette activité préfèrent utiliser la différence : énergie potentielle du baril extrait moins énergie dépensée pour l’obtenir.

Futur

La crise économique a certainement ralenti, voire arrêté, des projets de développement. Cependant, cette situation transitoire ne remet pas en cause les projets à long terme ; la Chine ne vient-elle pas d’annoncer en août 2009 qu’elle est prête à investir deux milliards de dollars canadiens dans l’exploitation des sables de l’Alberta ?

Les réserves annoncées sont considérables et perçues comme étant économiquement viables à moyen et long terme. Les sociétés pétrolières traditionnelles ont depuis quelques années manifesté positivement leur intérêt pour ces nouvelles sources d’hydrocarbures.

Indépendamment de toute considération écologique que chacun a le droit ou le devoir d’avoir, une fois de plus la question du jour n’est pas « les réserves d’hydrocarbures sont-elles épuisées ? » mais plutôt « combien voulez-vous payer pour un baril ? ».

Vous pouvez retrouver cet article dans le Flash n°13

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