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Droit de la mer et EMR

mardi 1er octobre 2013, par Alain Argenson (ECN 62)

1. Droit international

Dans un souci d’utilisation équitable et efficace des ressources marines, de leur conservation et préservation, la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer fixe, en 1982 à Montego Bay, des règles relatives à l’utilisation de cet espace et des ressources associées par les différents Etats. Les espaces maritimes sont délimités à partir de la ligne de base (limite des plus basses mers astronomiques calculées, les points établissant cette ligne sont les points extrêmes de la mer au sens du droit international) : les eaux intérieures, la mer territoriale, la zone économique exclusive et le plateau continental. Le droit des Etats diffère selon la zone considérée :

- Les eaux intérieures sont situées entre la côte et la ligne de base (voir schéma), il s’y exerce la souveraineté de l’Etat côtier.
- La mer territoriale s’étend au maximum à 12 milles marin (1 mille marin = 1852 m) à partir de la ligne de base et est, elle aussi, sous la souveraineté de l’Etat côtier et accorde aux navires un droit de passage inoffensif.
- Zone contiguë : elle ne peut pas s’étendre au-delà de 24 milles marins à partir de la ligne de base. L’Etat côtier peut y exercer le contrôle nécessaire en vue de prévenir et réprimer les infractions à ses propres lois et règlements.
- La zone économique exclusive (ZEE) est un espace d’une largeur de 200 milles au maximum à partir de la ligne de base. L’Etat côtier n’y a pas la souveraineté mais la juridiction, et il peut y exercer des droits souverains (donc exclusifs) pour l’exploitation des ressources biologiques et non biologiques comme l’énergie. L’Etat doit aussi y assurer la protection de l’environnement et y autoriser la recherche scientifique marine.
- En continuité du continent au-delà de la mer territoriale, l’Etat possède un plateau continental pouvant s’étendre au-delà de 200 milles et a le droit souverain d’en exploiter les ressources du sol et du sous-sol.

Le Domaine Public Maritime s’étend sur les eaux intérieures et sur la mer territoriale. Il est inaliénable et imprescriptible, principes décrétés dès 1566, dans l’Edit de Moulins.

Les Etat côtiers peuvent exploiter les ressources énergétiques dans les zones où s’exercent leurs droits souverains. L’exploitation des énergies marines renouvelables par l’Etat côtier est donc un droit pouvant s’appliquer aux eaux intérieures, à la mer territoriale ainsi que dans la zone économique exclusive. Quant à la haute mer, elle se situe au-delà de la juridiction nationale, c’est un espace ouvert à tous les Etats, côtiers ou non. En principe, ces derniers sont autorisés à exploiter ces énergies sous conditions des droits des autres Etats.

2. Droit français et européen

a. Loi Littoral

Cette loi datant de 1986 a été mise en place pour limiter l’urbanisation et l’aménagement du littoral. Pour cela, elle a comme objectifs de protéger les équilibres écologiques, encadrer l’urbanisme sur l’espace littoral, assurer l’accès du public au rivage et de privilégier les activités liées à la mer sur les espaces littoraux en limitant au besoin les autres usages.

Pour atteindre ces objectifs, la loi énonce également six principes d’aménagement, applicables aux communes littorales de métropole et d’outre-mer :

1. Extension de l’urbanisation en continuité des agglomérations et villages existants, ou en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement, pour lutter contre le « mitage » (notion de dispersion de l’habitat dans l’espace rural) ;

2. Limitation de l’extension de l’urbanisation dans les espaces proches du rivage ;

3. Protection des espaces non urbanisés dans la bande de 100 mètres par interdiction de construire, exception faite des constructions et installations nécessaires à des services publics ou des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau ;

4. Protection des espaces naturels remarquables du point de vue de la qualité des paysages et de leur intérêt écologique ;

5. Interdiction des routes côtières et voies nouvelles de transit à moins de 2.000 mètres du rivage, sauf contraintes topographiques et urbanistiques particulières ;

6. Accès libre au rivage.

Il est à noter que l’exploitation des Energies Marines Renouvelables (EMR) n’étant pas envisagée au moment de la rédaction de la loi Littoral, leur statut y est incertain, contrairement à celui des activités traditionnelles ; il s’agit pourtant d’aménagements liés à des activités nécessitant la proximité de la mer. Ainsi le raccordement des parcs EMR au réseau électrique terrestre nécessite des aménagements côtiers devant respecter la Loi Littoral. Par exemple, selon cette loi, dans les « espaces naturels remarquables » identifiés au titre de la Loi Littoral et reportés sur les documents d’urbanisme, seuls sont tolérés les « aménagements légers et réversibles ». Or les câbles de raccordement seront-ils bien considérés comme étant « légers » ?

De la même manière, les implantations des parcs EMR et les installations associées (câbles, transformateurs) ne sont généralement pas pris en compte dans les documents de planification territoriale sur le littoral (SCOT ou PLU, SMVM, Contrat de baie, etc.).

L’application de cette loi est différente dans les Départements d’outre-mer (DOM) et les Collectivités d’outre-mer (COM).

Dans les DOM, la Loi Littoral est plus souple qu’en métropole concernant la construction dans les espaces naturels. De plus, il n’y a pas de domaine public maritime (DPM) comme en métropole mais une zone dite des « cinquante pas géométriques » (ZPG). Contrairement au DPM qui est inaliénable, les espaces en ZPG peuvent être cédés au bénéfice des communes, des organismes d’habitat social mais aussi d’occupants sans titre. Pour faire face à cette privatisation a été adoptée en 1996 la Loi Littoral des DOM. Elle permet aux espaces naturels de la ZPG qui sont inclus au DPM d’être transférés au Conservatoire du littoral. Ils pourront ainsi bénéficier d’une meilleure protection.

Par ailleurs, les documents de planification des DOM n’abordent souvent pas le sujet du raccordement des EMR, car cela n’a pas été anticipé dans les documents lors de leur réalisation.

La loi Littoral ne s’applique pas aux COM. De façon générale, le droit local n’est pas suffisamment adapté au développement des EMR car il n’a pas été anticipé. De nouveaux textes sont en cours de rédaction.

b. Aires marines protégées

La loi du 14 avril 2006 entérine la création de l’Agence des aires marines protégées et instaure les parcs naturels marins.

Une aire marine protégée est un espace délimité en mer au sein duquel un objectif de protection de la nature à long terme a été défini. L’objectif de protection n’est pas exclusif, d’autres objectifs, tel le développement économique maîtrisé et raisonné des activités maritimes, peuvent être pris en compte.

La loi identifie comme aires marines protégées :
- les parcs nationaux (celui de Port Cros étant à ce jour le seul avec une partie marine),
- les réserves naturelles ayant une partie maritime (Scandola en Corse),
- les aires sous arrêtés de protection de biotope ayant une partie maritime,
- les sites Natura 2000 ayant une partie maritime,
- le domaine public maritime remis en gestion au Conservatoire du littoral,
- les parcs naturels marins.

La France métropolitaine compte 288 aires marines protégées.

Selon la catégorie d’aires marines protégées, les projets de développement d’énergies renouvelables en mer ne seront pas soumis aux mêmes contraintes et encadrement.

Retrouvez également cet article dans le Flash n°36.

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